Interview décalée d’Olivier Truc

Pour cette nouvelle édition, Isabelle, pétillante stagiaire des Boréales, vous a concocté des interviews décalées des artistes de la programmation. Olivier Truc s’est prêté au jeu des questions/réponses.

Pourquoi vous êtes-vous intéressé aux rennes et pas aux cerfs ou aux ours polaires ?
En fait je pensais trouver des cerfs en Laponie, et même le dernier cerf d’après mes infos, car le cerf de la toundra est en voie de disparition comme vous le savez bien aux Boréales. Le jour où j’arrive enfin à le coincer, un ours polaire – le dernier ours polaire de la toundra, d’après mes infos – le dévore sous mes yeux. De frustration, j’ai bondi sur l’ours qui s’est échappé en aboyant et aux dernières nouvelles, il aurait été vu non loin des côtes islandaises, toujours miaulant. Un cas très rare. De dépit, je me suis rabattu sur les rennes, qui m’ont heureusement initié à un monde fascinant.

De quelle manière votre âme de journaliste influence votre écriture ?
Ah, enfin quelqu’un qui admet que les journalistes ont une âme. De fait, je suis journaliste depuis bientôt 30 ans, et j’en garde un goût prononcé pour les atmosphères, les lieux et les personnages qui incarnent des thématiques ou des phénomènes de société. Egalement un goût prononcé pour l’écriture simple et lisible, pour la compréhension due au lecteur, et pour le côté addictif de la chasse que procure l’enquête, qu’elle soit journalistique ou « polardeuse ». Le roman noir a été inventé, comme un prolongement naturel du journalisme, pour les reporters frustrés.

Pourquoi les journalistes ont toujours une barbe de 3 jours ?
C’est contractuel, comme le sac besace et la veste aux manches élimées. Quand on sait la difficulté de conserver une barbe de trois jours irréprochable, on ne peut qu’admettre que c’est placer la barre très haut, mais l’exigence de vérité est à ce prix. Cette condition explique quasiment à elle seule pourquoi la profession est majoritairement féminine. Pour les journalistes femmes, c’est plus simple, il leur suffit d’être intelligentes et compétentes.

Pourquoi utilisez-vous la Laponie comme territoire de vos intrigues ?
Ces dernières années, les auteurs de polars nordiques se sont multipliés comme des bouteilles de vodka un soir de Saint Jean, annexant le moindre bled scandinave pour le transformer en décor où les crimes terrifiants et improbables s’enchainent afin d’attirer des touristes étrangers aux goûts douteux. Je suis arrivé tardivement en Europe du Nord, la distribution était déjà terminée, et il ne restait que les grands espaces froids et désolés de Laponie (on ne le sait pas, mais les auteurs nordiques sont frileux). Le coup de foudre a été immédiat, car loin des yeux de tous, dans un décor où il ne devrait rien se passer, il se déroule des histoires étonnantes avec des personnages hors-du-commun.

Qu’est-ce qui vous attire dans la culture suédoise ?
Ce qui m’intéresse dans la Suédoise, outre sa beauté, sa fraîcheur et sa simplicité,  c’est ce mélange de romantisme et de pragmatisme, sa capacité à conjuguer tradition et modernité avec un naturel irrésistible, une certaine idée de la mélancolie, un rapport sain à la nature qui vous invite à vous prélasser dans ses formes souples, ce sont ses lignes claires et une approche jamais élitiste de l’autre.

Propos recueillis par Isabelle.

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